vendredi 5 janvier 2007

Analyse du premier ACTE

Oui, elle est vraiment magique, cette « Flûte Enchantée », et magique à plus d'un titre :
  • D’abord dans l’intégibilité des textes même chantés (ce qui est rare pour un Opéra)
  • dans sa musique, souvent hors de l'espace et du temps (comme l’est notre rituel),
  • dans les intentions de son créateur et de tous les artistes qu'elle a inspiré,
  • enfin, dans le message que chacun peut comprendre qu'elle lui apporte.
On peut bien naturellement voir dans l'action et les personnages de la Flûte enchantée un antagonisme entre deux conceptions extérieures : le Bien et le Mal, L'homme et la femme, le monde ordinaire et les idéaux d'un univers maçonnique, etc, etc,...
Je suis intimement persuadé que Mozart a souhaité donner un message au monde, c’est ce que je vous propose de décoder ensemble au travers de cette planche.
Par la profondeur des thèmes évoqués, la « Flûte enchantée » nous relie aux grands récits initiatiques du combat intérieur qui conduit le chercheur de vérité à la vie spirituelle.
Entre les portes de la vie et de la mort, nous pourrons, certes, vivre sans nous poser un seul instant les questions fondamentales : Qui suis-je ? D'où viens-je ? Où vais-je ? (les questions du testament philosophique lors de notre épreuve de la Terre).
Mais si nous posons le pied sur le sentier d'une recherche spirituelle, c'est alors que les premières interrogations apparaissent : qu'est-ce que la véritable vie, qu'y a-t-il après la mort, pourquoi des religions s'opposent-elles, etc...?
Ainsi, sans aucun doute, Mozart, étant donné le soin qu'il a pris à composer la « Flûte Enchantée » et l'intérêt qu'il y a porté jusqu'à sa mort, nous a transmis un message.
Je le comprends ainsi :
  • Chacun des aspects de notre réalité microcosmique peut être symbolisé par un personnage de « La Flûte ». Leurs noms n'ont d'ailleurs pas été choisis au hasard. Tamino et Pamina signifient : « homme et femme consacrés au dieu égyptien Min ». Papageno dérive du mot perroquet (celui qui répète sans se poser de questions, celui qui ne vise qu'à reproduire les actes de la vie naturelle). Sarastro évoque en nous le nom de Zoroastre l'initié. Monostatos semble être la contraction de « mono » (un) et de « statos » (statique, celui qui n'évolue pas...)
  • Chaque phase du chemin peut être vue, comme un épisode de l'aventure qui sera la notre, si nous entamons une recherche spirituelle. Car tous ses aspects sont souvent mal compris et il faut sans cesse l'expliquer.
  • Chercheurs de vérité, nous sommes donc Tamino qui pénètre dans ce paysage chaotique, sauvage, non entretenu du domaine de la Reine de la nuit.
  • C'est notre monde, avec toutes ses contradictions, ses luttes et ses échecs, son absence totale d'harmonie.
Nous sommes sans armes, attaqués par un serpent qui symbolise notre instinct vital le plus aveugle et contre lequel nous sommes impuissants (Tamino possède un arc sans flèche).
Et nous crions alors : « au secours ! » comme Tamino.

Acte 1 Scène 1
Tamino, revêtu d’un splendide habit de chasse japonais, descend d’un rocher à droite, il tient un arc mais n’a pas de flèche ; un serpent le poursuit. Ensuite les 3 Dames.
Tamino :
A l’aide ! A l’aide ! Sinon je suis perdu, je vais être la proie du serpent maléfique. Dieux miséricordieux ! Le voilà qui s’approche ! Ah sauvez-moi ! Ah protégez-moi !

Il nous faut impérativement dépasser les barrières élémentaires de la vie ordinaire pour accéder à la conscience d'un travail initiatique à accomplir.
Le serpent de l'habitude, le serpent des instincts jusqu'ici assouvis, le serpent de la tentation à se laisser aller, dans le courant de ce monde nous poursuit continuellement.
Comment y résister sans s'abandonner totalement à d'autres forces, sans « s'évanouir » symboliquement au monde des illusions. Ici, l’évanouissement de Tamino symbolise le début de la préparation de celui-ci à sa future initiation.
Ces forces sont représentées par Mozart sous les traits de trois Dames qui apparaissent toujours voilées.
Elles s'annoncent comme étant les messagères de la Reine de la Nuit, ceci pour bien nous montrer que notre personnalité, qui appartient à ce monde, possède les trois pouvoirs naturels nécessaires pour quitter le royaume des ombres :
− la force d'aspiration de notre coeur à renverser le cours établi des choses,
− la puissance de la compréhension qui émane de notre tête
− enfin la volonté d'agir qui nous pousse à l'aventure spirituelle.
Les trois dames apparaissent voilées car nos pouvoirs naturels sont également voilés aux yeux du monde qui n'attend de nous qu'un comportement conventionnel, « naturel ».
Après avoir vaincu le serpent, les trois dames jouent alors une étrange comédie de la séduction vis à vis de Tamino : elles le veulent, possessivement, chacune pour elle-même.

Acte 1 Scène 1
1ère Dame :
Un jeune homme charmant, doux et beau.
2ème Dame :
D’une telle beauté, je n’en ai jamais vu.
3ème Dame :
Oui, oui, c’est sûr, il est à peindre.
3 Dames :
Si mon cœur devait être voué à l’amour, je le donnerais à ce jeune homme

Et là aussi, devant cet univers nouveau qui s'ouvre à nous, trois orientations nous sont offertes comme trois tentations :
− le mysticisme qui conduit souvent à une religiosité aveugle,
− l'occultisme qui pousse à une recherche spéculative,
− la tentation du pouvoir avec tous ses excès.
Mais le danger s'éloigne et Tamino est réveillé par le babillage d'un nouveau personnage : Papageno qui symbolisera, l'aspect naturel de notre être.

Acte 1 Scène 2
Papageno descend par un sentier, il porte sur le dos une grande cage qui dépasse largement le haut de sa tête et où se trouvent des oiseaux divers ; de plus, il tient des 2 mains une flûte de pan, il en joue et chante.
Papageno :
Je suis l’oiseleur, me voilà, toujours joyeux, hop là, tralala ! Moi, l’oiseleur, je suis connu des jeunes et des vieux, en tous lieux. Je sais m’y prendre pour attirer et m’y entends aussi pour siffler. Aussi je puis être gai et joyeux, car tous les oiseaux sont à moi. (Il joue)
Je suis l’oiseleur, me voilà, toujours joyeux, hop là, tralala ! Moi, l’oiseleur, je suis connu des jeunes et des vieux, en tous lieux. Je voudrais un filet pour demoiselles. J’en attraperais à la douzaine ; puis je les enfermerais chez moi, et toutes les filles seraient à moi. (Il joue)

Il y a en tout candidat à la libération de l'âme, un Tamino et un Papageno.
Mais il y a plus encore car le candidat aux mystères, ne réduit pas sa manifestation terrestre à la seule existence de sa personnalité.
Il sait qu'il est l'hôte animateur d'un petit monde, d'un « microcosme » comme on pourrait l’appeler.
Celui-ci abrite en son centre l'idée divine, l’Amour, symbolisée par Pamina.
C’est Monostatos qui retient notre âme prisonnière dans la vie et les passions, en utilisant toute la puissance du corps émotionnel de la personnalité. Monostatos veut Pamina lui aussi mais pour en jouir à des fins naturelles et non pas lui rendre la possibilité d'exprimer les lois de l'Ordre de l'Esprit.
Monostatos camoufle toujours ses actes les plus inavouables, sous des apparences trompeuses.
Ainsi, il a persuadé Pamina qu'elle était prisonnière de Sarastro. Or c'est faux !
Pamina appartient au monde de la Lumière, c'est à dire au royaume de Sarastro, mais n'en est en aucun cas prisonnière. Pour l'instant, elle n'en a pas conscience. Et la Reine de la Nuit le sait bien elle aussi. Sa propre version qu'elle fait à Tamino, du soi-disant enlèvement de Pamina par Sarastro, sonne parfaitement faux. L'outrance et la haine apparaissent tout au long du récit. La musique le souligne. C’est maintenant que la vérité sur Sarastro et la Reine de la Nuit nous est révélée.

Acte 1 Scène 6
La Reine est assise sur un trône orné d’étoiles brillantes. Les Mêmes.
La Reine de la Nuit :
Récitatif :
Oh, ne tremble pas, mon cher fils ! Tu es innocent, sage, pieux ; c’est un jeune homme comme toi qui peut le mieux consoler le profond chagrin de mon cœur maternel.
Air
Je suis condamnée à la souffrance, car ma fille me manque ; avec elle, j’ai perdu tout mon bonheur, un scélérat me l’a enlevée. Je la revois trembler, bouleversée de peur, frémir d’angoisse, se débattre sans audace. Sous mes yeux, elle me fut ravie, Ah, au secours ! c’est tout ce qu’elle m’a dit. Mais ses supplications furent vaines, car mon pouvoir était trop faible. Toi, tu iras la délivrer, tu seras son sauveur, si je te vois encore vainqueur, elle sera à toi pour l’éternité.
(Elle sort avec les 3 Dames. Le décors est à nouveau le même qu’au premier tableau)

La Reine de la Nuit a compris que Tamino est tombé amoureux de sa fille et elle va le lancer dans une quête dont elle espère que sa fille lui sera rendue et qu’elle prendra possession du « soleil aux sept auréoles ».
Il en va de même du chercheur de vérité qui est touché par un immense désir d'absolu.
Le monde essaiera toujours de « récupérer » cette force d'amour à des fins ordinaires.
Cependant, les trois dames réapparaissent bien vite, d'abord pour délivrer Papageno.

Acte 1 Scène 8
Les 3 Dames, Papageno, Tamino.
1ère Dame (à Papageno)
La reine te fait grâce.
(Elle lui ôte le cadenas qu’il avait sur la bouche.)
Par moi, elle te remet ta peine.

Car pendant toute cette phase préparatoire à l'initiation, il fallait que le naturel se taise, d'où le cadenas sur la bouche de Papageno, et que le chercheur agisse « en vérité », d'où cette recommandation faite à Papageno de ne plus jamais mentir.
Et maintenant, c'est avec toutes les ressources de sa personnalité naturelle donc, en compagnie de Papageno, que celui qui se lance sur un chemin d'accomplissement spirituel, Tamino, pourra réussir.
Papageno et Tamino sont indissolublement liés, chacun d'eux reçoit un instrument magique.
Une flûte pour Tamino et des clochettes pour Papageno. La Flûte « magique » permettra à Tamino de recevoir l'aide divine. Car elle a été fabriquée par le père de Pamina, Maître du domaine de l'Esprit. Cette précision, nous confirme l'origine divine de Pamina. Pamina, c'est la parcelle du divin, prisonnière de la personnalité et qui, jusqu'à sa rencontre avec Sarastro croît même appartenir à ce monde de la chute, être la fille de la Reine de la nuit. Et Tamino usera quatre fois de sa flûte :
  • d'abord pour appeler Pamina, mais il ne recevra pas de réponse, pas plus que le candidat aux mystères ne peut y pénétrer par un effet de sa volonté.
  • Ensuite pour manifester sa joie, et se rendre compte que le son de cet instrument « charme » les « hommes-sauvages » (selon une précision du livret et que les metteurs en scène transgressent toujours en figurant des animaux charmés par la flûte de Tamino). Il est fait allusion ici à la puissance du souffle divin sur l'homme de la masse, l'homme « animal », c'est à dire « animé » par les seules forces de ce monde, et qui devient réceptif à « autre chose » que sa vie naturelle.
  • Puis, après le début de son initiation, c'est à dire après avoir acquis quelques dons spirituels, lorsqu'il appelle à nouveau Pamina au second acte et que cette fois elle vient à lui, cette nouvelle âme-Esprit réveillée mais vis à vis de laquelle il doit encore demeurer silencieux.
  • Enfin Tamino utilisera les pouvoirs de son instrument pour franchir le monde des enfers (les épreuves du feu et de l’eau)
  • Papageno, lui, reçoit des clochettes et chaque fois qu'il s'en servira, ce sera pour résoudre un problème lié à l'aspect naturel de la personnalité du chercheur qu'il symbolise :
  • pour « apprivoiser » Monostatos au 1er acte et échapper à sa colère. Donc, lui imposer sa volonté qui pressentant sa défaite veut punir Pamina et Papageno.
  • pour « appeler » sa Papagena, son double au féminin. Le chercheur, sur son chemin, ne doit pas faire appel qu'à ses possibilités martiennes naturelles (Papageno), sa volonté supérieure, mais aussi posséder des qualités de coeur symbolisées par l'aspect vénusien de Papagena, l'amour véritable.
Ainsi donc tout est prêt pour le grand voyage initiatique.
Tamino a pris conscience de sa mission.
Il a dans son coeur la flamme de l'amour qui le pousse, le désir de l'accomplissement divin.
Il possède le moyen de vaincre, grâce à la magie gnostique : la flûte enchantée, dont il ne sait pas encore se servir. Papageno, l'aspect naturel du candidat est naturellement du voyage. Il ne manque qu'une indication au chercheur débutant : Où aller ? Où est le domaine de l'Esprit ? Comment ne pas se perdre ?
Tamino ne peut se tourner vers ses pouvoirs naturels pour le guider : Dans l'opéra, les trois dames se voilent la face et disparaissent. Alors apparaissent, venant du ciel, trois enfants, qui symbolisent trois nouveaux pouvoirs en croissance.
Le grand voyage commence donc pour Tamino et Papageno guidés par les nouvelles forces qui les animent.
L'opéra nous montre maintenant Pamina échappant à la convoitise de Monostatos, qui la veut pour lui seul, en invoquant le nom de Sarastro.
Elle se réfugie dans un bois de palmiers, ce qui dans la langue des mystères, signifie arriver à la limite au-delà de laquelle le champ de la résurrection de l'âme-esprit, lui est ouvert.
La rencontre qui survient alors, permet à Papageno de préparer Pamina à l'arrivée du prince Tamino qui vient pour la délivrer.

Acte 1 Scène 14
Papageno, Pamina.
Papageno :
Quel idiot je fais, de m’être laissé terroriser ! Il y a bien des oiseaux noirs sur terre, pourquoi pas aussi des hommes noirs ? Ah, voilà que la jolie demoiselle est encore là. Dis-moi, fille de la reine de la nuit…
Pamina :
Reine de la nuit ? Qui es-tu ?
Papageno :
Un messager de la reine flamboyante.
Pamina (avec joie) :
De ma mère ? Oh, quel bonheur ! Dis-moi ton nom !
Papageno :
Papageno
Pamina :
Papageno ? Papageno… Je me souviens avoir souvent entendu ce nom, mais toi, je ne t’ai jamais vu.
Papageno :
Ni moi non plu.
Pamina :
Ainsi tu connais ma bonne et tendre mère ?
Papageno :
Si tu es vraiment la fille de la reine de la nuit – oui !
Pamina :
Oh oui, c’est moi.
Papageno :
Je vais vérifier cela tout de suite. (Il regarde le portrait qui a d’abord été remis au prince et qu’il porte à présent pendu à un ruban autour du cou). Les yeux noirs – exact, noirs – les lèvres rouges – exact, rouges – cheveux blonds – cheveux blonds. Tout concorde, sauf les mains et les pieds. A en croire le portrait, tu ne devrais avoir ni mains, ni pieds, car là-dessus ils ne sont pas indiqués.
Pamina :
Tu me permets – Oui, c’est moi. Comment se fait-il qu’il soit entre tes mains ?
Papageno :
Ce serait trop long à te raconter. Il est passé de mains en mains.
Pamina :
Mais comment a-t-il abouti dans les tiennes ?
Papageno :
D’une manière miraculeuse. Je l’ai capturé.
Pamina :
Capturé ?
Papageno :
Il faut que je te raconte cela plus en détail. Ce matin, je me suis présenté, comme d’habitude, au palais de ta mère avec ma livraison…
Pamina :
Livraison ?
Papageno :
Oui. Depuis des années, c’est moi qui livre à ta mère et à ses dames tous les beaux oiseaux du plaisir. Juste comme je m’apprêtais à remettre mes oiseaux, j’ai vu devant moi un homme qui se fait appeler prince. Ce prince a su plaire à ta mère, au point qu’elle lui a fait cadeau de ton portrait et lui a commandé de te délivrer. Sa décision a été instantanée, tout comme son amour pour toi.
Pamina :
Amour ? (avec joie). Il m’aime donc ? Oh, dis-le moi encore une fois, j’aime tant entendre le mot amour.

C’est l'aspect naturel de la personnalité qui prend conscience en premier de la possibilité de renaissance endormi en nous.
Le récit nous montre ensuite Tamino arrivant, conduit par les trois enfants.

Changement de tableau
Le décor représente un bois sacré. Tout au fond de la scène, on aperçoit un beau temple sur lequel sont inscrits ces mots : « Temple de la Sagesse ». Ce Temple donne accès, par un péristyle, à 2 autres temples ; sur celui de droite, on lit : « Temple de la Raison » ; sur celui de gauche : « Temple de la nature ».

Acte 1 Scène 15
3 Enfants font entrer Tamino, chacun d’eux a une palme d’argent à la main.
Les 3 enfants :
Jeune homme, cette voie te mène au but, mais tu devras vaincre en homme. Ainsi écoute nos conseils : sois ferme, patient et discret.

Des conseils de comportement sont donnés à Tamino.
Tant il est vrai que le candidat aux mystères a besoin d'être exhorté fermement : « Sois un homme et tu vaincras en homme ».
Ces questions-réponses ressemblent à celles entre le Vénérable-Maître et l’impétrant au seuil de sa première entrée dans le Temple.
Le chemin de l'initiation passe obligatoirement par une véritable connaissance de soi.
Rappelons-nous ce qui était inscrit au fronton du temple de Delphes : « Homme, connais-toi toi-même et tu connaîtras l'Univers et les Dieux ». Pour prendre cette décision, on ne peut être que seul.
Quel temple choisir, se demande Tamino ? Le temple de la Nature, celui de la Raison ou celui de la Sagesse ?
Mais pour lui, il n'est qu'une voie possible : celle du cœur.

Acte 1 Scène 15
Le Prêtre :
Téméraire étranger, où veux-tu aller ? Que cherches-tu dans ce sanctuaire ?
Tamino :
Je voudrais acquérir l’Amour et la Vertu.

Et notez bien qu'il ne répond pas « Pamina » !
C'est à cet endroit précis du récit que pour le spectateur non averti, l'histoire de l'opéra de Mozart « déraille ». On était confortablement installé dans une histoire naturelle d'amour et tout à coup le ton change, la musique change elle aussi de tonalité, elle se fait solennelle. On pénètre dans un récit d'une haute portée spirituelle. Les explications qui ont précédé nous ont préparé à suivre maintenant Tamino, l'aspect le plus noble du chercheur de vérité, sur la voie des mystères.
Dans le dialogue que Tamino engage avec l'Orateur, sur le seuil du temple de la Sagesse, une partie de la vérité lui est dévoilée.

Acte 1 Scène 15
Le Prêtre :
Une femme t’a donc abusé, une femme agit peu, parle beaucoup. Et toi, jeune homme, tu crois à ces bavardages ? O puisse Sarastro t’exposer les mobiles.

Oui, Sarastro règne sur le monde de l'Esprit. Non, Sarastro n'a pas enlevé Pamina. Oui, la Reine de la Nuit a abusé Tamino.
Pourquoi ce mystère ? Impossible de le révéler à qui n'a pas apporté la preuve qu'il en est digne.
Désespoir du candidat aux mystères qui ne reçoit aucune assurance sur sa recherche.
Ici, on ne prononce pas le nom de Pamina mais on invoque la force qu'elle représente. Ainsi le candidat est maintenant introduit dans le mystère de l'âme-esprit. Pamina, l'âme-esprit, n'a été soustraite aux desseins du monde naturel que pour être protégée et attendre d'être délivrée par l'amour d'une personnalité qui se voue à sa recherche.
Et le chercheur qui invoque alors l'aide divine, reçoit une première réponse.
Tamino joue de sa flûte magique et Pamina court vers lui, toujours accompagnée de Papageno.

Acte 1 Scènes 16 et 17 après que Tamino ait appelé Pamina en jouant de la flûte.
Papageno, Pamina délivrée de ses fers
Tous les 2 :
Y a-t-il plus grande joie ? Notre ami Tamino nous entend déjà ; le son de sa flûte est venu jusqu’ici. Quel bonheur si je le trouvais. Courons vite ! Courons vite !

Mais c'était sans compter avec l'ennemi intérieur de toujours, Monostatos, celui qui veut que rien ne change, qui va se saisir des deux fugitifs quand brusquement, il est neutralisé par le son des clochettes de Papageno, qui symbolisent l'harmonie.
Entre alors, Sarastro en cortège solennel. C'est là, sa première apparition.

Acte 1 Scène 18
Cortège de la suite de Sarastro. Celui-ci paraît en dernier, sur un char tiré par 6 lions. Les mêmes.
Chœur :
Vive Sarastro ! Longue vie à Sarastro ! C’est lui que nous révérons avec joie ! Puisse toujours ce sage jouit de la vie, c’est notre dieu, nous lui sommes tous voués.
(Ce chœur est répété jusqu’à ce que Sarastro descende de son char.)
Pamina : (s’agenouillant)
Maître, je suis coupable, j'ai voulu fuir ta puissance. Mais la faute n'en est pas à moi. Le méchant Maure voulait m'imposer son amour. C'est pour cela, Maître, que je t'ai fui.
Sarastro :
Relève-toi, rassure-toi, chère enfant ! Car sans chercher à percer on secret, je sais lire en ton cœur : pour un autre, tu as un vif amour. Je ne veux pas te forcer à aimer, mais je ne te rends pas la liberté.

Pamina découvrira la supercherie et se jette, à la fin du premier acte, aux pieds de Sarastro. Non seulement il excuse la fuite de Pamina mais il lui révèle seulement maintenant, que c'est à dessein et pour son bien, qu'il la retient loin de sa mère.

Acte 1 Scène 18
Sarastro :
Reste en mon pouvoir. Il t’en coûterait ton bonheur si je te laissais entre ses mains (de la Reine de la Nuit)
Tamino, conduit par Monostatos, se trouve pour la première fois en présence de Pamina.

Il y a « reconnaissance » mutuelle et un premier lien s'établit entre eux.

Acte 1 Scène 19
Monostatos amène Tamino. Les mêmes
Monostatos :
Eh bien, fier jeune homme, viens ici, voici Sarastro notre seigneur.
Pamina :
C’est lui.
Tamino :
C’est elle.
Pamina :
C’est lui.
Tamino :
Ce n’est pas un rêve !
Sarastro punit le Maure Monostatos de 77 coups de bâtons.

En d'autres termes, on retrouve ici l'instant de la première liaison entre les deux centres de conscience :
  • de la tête : jusqu'ici la recherche de Tamino était en effet encore très « théorique »,
  • et du cœur, siège de l'âme-esprit en devenir.
Le temps des épreuves va maintenant commencer et Sarastro ordonne de voiler la tête des deux héros, Tamino et Papageno et de les conduire au Temple. Là encore, il y a une allusion au rituel maçonnique quand les impétrants pénètrent dans le temple les yeux bandés.

Fin du premier acte.

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